Adèle, jeune fille paumée et malchanceuse, se retrouve une nuit sur un pont, prête à sauter et se donner la mort, après une énième déception amoureuse. Gabor, un lanceur de couteaux, la remarque et la dissuade de faire le grand saut en l’engageant pour un numéro de cirque. Aventureuse et quelque peu inconsciente, Adèle accepte. Leur tandem semble leur redonner chance à tous deux…
Dans une carrière en dents de scie, même si fournie en oeuvres régulièrement tournées, Patrice Leconte peut se vanter d’avoir cumulé quelques titres de gloire, notamment avec Les Bronzés, Monsieur Hire, ou Ridicule, et a plutôt rarement signé de comédies romantiques jusqu’à cette collaboration avec le scénariste Serge Frydman. La Fille sur le Pont se présente sans complexes comme une fable sentimentalo comique, avec un duo improbable (une jeune femme suicidaire et un lanceur de couteaux taciturne) et des situations à la limite du surréalisme. Les dialogues pétillent, l’humour le dispute à la tendresse, les bons mots aux moments plus touchants. Leconte étonne aussi par une mise en scène inspirée et par des images en noir en blanc tout à fait admirables, renforçant le côté « hors du réel » qui se déroule sous nos yeux. Certes, le script n’évite pas certaines naïvetés et sa morale simpliste (à deux, c’est toujours mieux!) n’empêchent en rien d’embarquer pour cette aventure amoureuse singulière. Une grâce certaine se dégage de l’ensemble, comme une magie inexplicable qui jaillit sans forcer.
Bon directeur d’acteurs, Leconte se régale à filmer la réunion de deux talents qui ne s’étaient jusque là pas encore croisé. Daniel Auteuil surprend en artiste torturé amoureux en silence de sa nouvelle recrue, campée par Vanessa Paradis. Exquise, formidablement photogénique, l’actrice de Noce Blanche occupe l’espace avec une présence inouïe, comme en témoigne son monologue de sept minutes qui ouvre le film et où la caméra est littéralement happée par son visage. C’est elle qui récolte les lauriers principaux de ce joli film, et ce malgré sa conclusion un peu « facile ». La Fille sur le Pont est bien un des crus les plus recommandables de l’auteur du Mari de la Coiffeuse.
ANNEE DE PRODUCTION 1999.
