John et Laura Baxter forment un couple heureux et parents de deux jeunes enfants. Un jour, leur petite fille Christine se noie accidentellement. Commence pour eux une longue période de deuil. Ils se rendent à Venise, où John s’occupe de restaurer des bâtiments historiques. Laura croise la route de deux étranges soeurs, dont l’une est aveugle mais a le don de médium. Elle la convainc que sa fille est toujours auprès d’eux, à veiller sur eux. John prend cela pour du charlatanisme. En même temps, des crimes sont commis par un mystérieux assassin…
Cette oeuvre de Nicolas Roeg, un chef opérateur britannique réputé, mêle trois genres: le drame, l’horreur, et le fantastique. C’est tout de même ce dernier qui prime sur le reste, avec l’installation d’un climat irréel, d’une ambiance étrange, et d’un sentiment constant de nager en eaux troubles. Dans les eaux d’une Venise pourrissante et mortifère, la caméra circule dans les ruelles étroites, oppressantes et un danger permanent semble planer sur la ville aux vaporettos et aux charmants petits ponts. Roeg maîtrise parfaitement ses plans, insère ce qu’il faut de bizarre dans le quotidien de ce couple en reconstruction, rongé par la culpabilité, mais qui tient encore par la force de leur amour. La grande réussite du récit tient au fait qu’il est à la fois limpide et sinueux, et comble du plaisir pour le spectateur, il nous balade d’un ressenti à un autre, brouillant les pistes astucieusement, jamais on ne peut anticiper ce qui va suivre. Les apparences y sont souvent trompeuses.
La qualité des interprètes contribue également positivement au film: Julie Christie au delà de sa plastique et de son beau visage déploie un jeu précis, Donald Sutherland face à elle nous régale de sa présence, en incarnant cet homme complexe, entre doutes, désespoir d’avoir perdu sa fille, et inquiétude pour sa femme. La longue séquence montrant leurs ébats avait fait un gros buzz à l’époque de la sortie (le sexe frontal était encore chose rare à l’écran). Mais c’est bien pour son incroyable richesse d’écriture (adapter Daphné Du Maurier a déja réussi à Hitchcock par exemple) et d’esthétisme que ce long métrage a marqué les esprits, ainsi qu’un final glaçant, inattendu et ce choc nous persuade que décidément, on meurt à Venise! Une expérience filmique envoûtante et déstabilisante.
ANNEE DE PRODUCTION 1973.