En 1952, Philomena Lee, adolescente irlandaise, tombe enceinte sans être mariée et est envoyée dans un couvent. Quand son bébé, Anthony, est très jeune, les religieuses l’enlèvent à elle et le mettent à l’adoption aux Etats Unis. Elle ne cesse de chercher son fils tout au long de sa vie. 50 ans après, elle se voit offrir l’aide d’un journaliste, Martin Sixsmith, pour enquêter et tenter de retrouver sa trace, dans le but de faire un reportage…
Le sujet se rapproche d’un film terrible, sorti en 2002, et réalisé par l’anglais Peter Mullan: The Magdelene Sisters et un autre cinéaste britannique, Stephen Frears, nous raconte de son côté l’histoire vraie d’une irlandaise octogénaire lancée dans le combat de sa vie: retrouver le fils que l’institution religieuse lui a arraché cinquante ans plus tôt. Ce mélodrame, digne et poignant, sans cesse à la limite dangereuse avec le tire larmes (heureusement sans y tomber), émeut profondément par son écriture finement construite, sa violence enfouie et son cheminement vers l’apaisement. Frears rajoute dans son script des petites notes d’humour avec l’opposition de deux protagonistes: Philomena est une vieille dame catholique et nourrie aux romans à l’eau de rose, sincèrement empathique, et Martin, un journaliste athée, snob et désabusé qui la juge un peu trop vite « simplette ». Pourtant, leur duo fait tout le sel de ce drame que l’on suit presque comme une enquête policière avec ses rebondissements et ses coups de théâtres malins. L’auteur de The Queen gagne en subtilité avec les années et en nous proposant ce réquisitoire contre l’Eglise irlandaise, il nous conte aussi une destinée incroyable, une vie détruite au nom d’une morale imbécile et de valeurs ancestrales.
On ne dira jamais assez combien les comédiens anglais sont parmi les meilleurs du monde, avec leur sens aigu des nuances, leur jeu tout le temps tellement vrai et une fois n’est pas coutume, Frears sait les choisir à merveille. Judi Dench incarne avec grandeur cette femme blessée et généreuse à la fois, luttant contre sa peine et ne cédant pas à la colère. Steve Coogan, plus habitué au registre comique, fait preuve de retenue et lui donne impeccablement la réplique. Précisons qu’il est également scénariste et producteur de cette histoire qui devait certainement lui tenir très à coeur. Ce film émouvant nous redonne foi en un cinéma britannique un peu trop vampirisé par Ken Loach.
ANNEE DE PRODUCTION 2013.