Zorg, 35 ans, employé au gardiennage dans un village de bungalows en bord de mer, rencontre Betty, une jeune femme pulpeuse qui s’installe bientôt chez lui. Son patron n’est pas content, mais finit par accepter la nouvelle venue, à condition qu’elle aide Zorg à repeindre les 500 cabanons. Un jour, Betty fouille dans les affaires du jeune homme et découvre le manuscrit d’un roman qu’il n’a pas publié. Emballée, elle se met en tête de trouver un éditeur pour lui…
Le roman de Philippe Djian était déjà d’une facture originale, solide, et sulfureuse. Pour l’adapter, Jean Jacques Beinex, un « gars de la pub » et auteur de Diva a pondu un scénario fidèle, flamboyant et rendant encore plus « dingue » l’histoire de cette passion destructrice. Le film comporte des images à la fois sublimes et marquantes, des séquences érotiques où la nudité est frontale, crue, et des dialogues jugés aussi « vulgaires » que poétiques. C’est un conte d’amour radical, tragique et passionnel, entre deux êtres jusqu’au boutiste, des inadaptés à ce monde qu’ils jugent néfastes à leurs rêves. Sur une musique à tomber, composée par Gabriel Yared, on suit leur parcours amoureux, tout en sentant que quelque chose va inévitablement craquer, décelant la fragilité mentale de l’héroïne. 37°2 le matin fut un électrochoc au milieu de ces années 80 baignant dans la publicité à outrance, dans l’ère du clip vidéo, et son romantisme noir échevelé a profondément parlé à une génération en perte d’idéaux. Beinex peut en effet se targuer d’avoir un style clinquant, de ne pas se soustraire à des concessions moralistes et surtout d’assumer la violence de son propos.
Une jeunesse assoiffée d’insoumission et de rebellion s’est reconnue dans ce récit fiévreux, que l’on redécouvre encore aujourd’hui, sans risquer de lui trouver des rides. C’est une oeuvre libre, sauvage, et intemporelle que Beinex a porté avec ses comédiens et ce duo incroyable de vérité. Jean Hugues Anglade envoie du lourd dans ce rôle d’écrivain incompris et aveuglé par le coup de foudre total, tandis que Béatrice Dalle bouffe littéralement l’écran pour son baptême d’actrice. Elle incarne une Betty incendiaire, écorchée et fêlée, qu’il est impossible de ne pas aimer. Sa présence animale fut la révélation extraordinaire de cet objet culte envoutant, à la sensualité désespérée. La version longue de 3H est encore plus recommandable que celle exploitée en salles à sa sortie.
ANNEE DE PRODUCTION 1986.