Louis, 33 ans, revient dans sa famille, qu’il n’a pas revu depuis 12 ans, afin de leur annoncer sa mort prochaine. Il se retrouve face à une mère fofolle, un frère irascible, une soeur rebelle et une belle soeur moins conne qu’elle n’en a l’air…
Le petit génie venu du Québec, Xavier Dolan, adapte pour la première fois une pièce de Jean Luc Lagarce et s’approprie totalement le propos, en scrutant au plus près ses comédiens. Il s’agit là d’un grand film d’acteurs avant toute chose. Dolan transcende le simple côté « théatre filmé », par son style si particulier, son talent pour insérer de la musique quand les silences sont trop lourds, pour tenter des mouvements de caméras incongrus pour prendre de court le spectateur. Cette famille dysfonctionnelle fascine et effraie à la fois, les non dits prennent toute la place, le ressentiment et les rancunes occupent l’espace jusqu’au malaise. Le drame intense couve sous la surface des conversations les plus anodines, l’ombre de l’homosexualité et du Sida sont présentes en filigrane mais sans jamais être cités, et quand le ton monte, on sent les fêlures de chacun apparaître. Cette maison où tout se joue sert de décor et le cadre si resséré sur les comédiens donne un sentiment d’étouffement, comme une toile d’araignée piégeant sa proie.
L’excellence de l’interprétation domine tout du long: de Nathalie Baye en mère très volubile et décalée (elle est superbe) à Vincent Cassel qui joue le frère agressif et caractériel avec délectation. Mais aussi Léa Seydoux qui compose un personnage attachant de soeur aimante et un brin larguée, ou Gaspard Ulliel discret et pudique comme l’exige son rôle de jeune homme ne sachant comment annoncer le pire à des proches qu’il n’a pas vu depuis des années. Mention spéciale à Marion Cotillard, absolument incroyable dans le personnage de la douce belle soeur, un peu maladroite et en décalage avec le reste de la famille, et qui pourtant, dés le départ, a sûrement tout compris. Grâce à eux et à son don évident de mise en scène, Dolan frappe un grand coup et nous offre une oeuvre douloureuse et très émouvante.
ANNEE DE PRODUCTION 2016
