Bertrand Morane est un séducteur invétéré, prêt à toutes les audaces pour une rencontre féminine. il raconte dans une autobiographie les multiples femmes qui ont jalonné sa vie, le livre ne manque pas de verve et attire l’attention d’une ravissante éditrice charmée autant par l’auteur et sa capacité à mettre en mots ses émotions que par l’homme qu’elle trouve irrésistible. Entre eux, une relation de respect et de séduction s’amplifie…
Après Les 400 Coups qui relatait son adolescence mouvementée, L’Homme qui aimait les femmes constitue la seconde oeuvre la plus personnelle de François Truffaut, grand amateur de femmes dans sa vie privée. Son personnage, Morane, n’est pas un simple Casanova collectionnant les conquêtes pour le simple plaisir de batifoler, c’est un véritable amoureux, attentionné, un enfant dans un corps d’homme à la recherche perpétuelle de l’éternel féminin, partant d’une image de sa mère et le souvenir tendre qu’il en garde jusqu’à ses maitresses toutes désirables à ses yeux pour des raisons différentes. Le scénario suit le schéma d’un livre en train de s’écrire, puisque le héros relate ses rencontres avec humour, lucidité, franchise, détaillant ce qui a attiré son regard chez chacune d’entre elles. Selon sa phrase « Les Jambes des femmes sont comme des compas qui arpentent le globe terrestre en tous sens, lui donnant son équilibre et son harmonie« , le récit lui aussi charme par sa légèreté d’écriture, l’aisance avec laquelle Truffaut décrit des situations amoureuses et/ou érotiques sans jamais tomber dans la grivoiserie. Avec une mise en scène élégante, presque aérienne, le film alterne lyrisme, comédie, parfois un brin de gravité, et s’autorise des clins d’oeil malicieux avec le propre cinéma de son auteur (la femme qui cherche midi à 14h anticipe Mathilde de La Femme d’â côté, le chaton noir qui vient boire le lait dans le plateau de la chambre d’hôtel où les amants viennent de faire l’amour comme dans La Nuit Américaine) et Morane lui même est une version plus développée de l’artiste peintre amoureux (pour son malheur) de Jeanne Moreau dans La Mariée était en noir.
Dans le rôle titre, Charles Denner est tout bonnement remarquable, sans doute sa meilleure composition après le Landru de Chabrol. Sensible, délicat, la voix éraillée, anxieusement tragique et le regard fou d’amour pour toutes ces beautés qu’il croise avec gourmandise. Un double de Truffaut dans toute sa splendeur, avec un esprit coquin et ludique en prime. Saluons évidemment toutes les actrices qui jalonnent le métrage, de Leslie Caron à Nelly Bourgeaud, de Monique Dury à Geneviève Fontanel, en passant par Nathalie Baye (à ses relatifs débuts) et surtout Brigitte Fossey, au sourire éclatant et au charme bien connu. Du coup, même la séquence de l’enterrement qui ouvre et clôt en une belle boucle bouclée n’a pas de caractère triste ou sombre: c’est romanesque, libre, pétillant comme du Guitry, un autre admirateur (et néanmoins critique) de la gente féminine. Un très beau film en tout cas, à voir et à revoir sans lassitude possible.
ANNEE DE PRODUCTION 1977.