Un tueur sadique de jeunes femmes seules sévit à New York. La terreur est à son comble. Le fondateur d’une prestigieuse agence de presse réclame de ses employés (directeur, rédacteurs en chefs, photographes) davantage de sang à la Une. A sa mort, il laisse la direction du groupe à son fils incapable. Ce dernier décide donc de mettre en concurrence les professionnels de l’agence, quitte à se trahir les uns les autres. Tous les coups les plus bas sont alors permis…
Après de très brillants films fondateurs, réalisés en Allemagne (M le Maudit) et en Amérique (L’ange des maudits, Réglements de comptes) Fritz Lang poursuit sa carrière avec ce thriller noir, au moment où la télévision et les médias prennent une place cruciale dans le paysage audiovisuel. Et justement, au delà de cette histoire de tueur solitaire inquiétant, il décrit le milieu carnassier et impitoyable d’un empire journalistique, à l’affût du scoop le plus vendeur. Ainsi, cette 5ème victime se transforme en charge virulente contre le comportement hypocrite, veule et gangréné par l’ambition des personnages qu’il dépeint. La satire est brillante, ironique et s’autorise même un humour acide, de cette façon Lang fait de ces arrivistes acharnés des figures ignobles et à l’âme plus sombre encore que le criminel lui même! La force de sa réalisation réside dans sa souplesse, sa fluidité et son efficacité exemplaire. Le noir et blanc remarquable n’a d’égal que l’intelligence du script qui ne se cantonne pas à rester un simple film policier de plus.
L’auteur de Métropolis dissèque un monde perverti par la quête du sensationnel (et oui, déjà à cette époque!!) et offre une oeuvre à la fois divertissante et profonde, soulevant une question pertinente: qui sont les vrais monstres? Les assassins ou ceux qui exploitent leurs crimes? Ce rôle néfaste joué par les journalistes n’aura de cesse de s’amplifier jusque dans notre monde actuel. La distribution, classieuse, attire aussi notre attention: de Dana Andrews en rédacteur en chef prêt à sacrifier jusqu’à sa petite amie, à Rhonda Fleming en épouse infidèle calculatrice, en passant par George Sanders à l’élégance toujours intacte, et Ida Lupino en femme fatale et délicieusement amorale, tous et toutes délivrent des performances éclatantes. Un des meilleurs films noirs du cinéma américain.
ANNEE DE PRODUCTION 1955.
