Nélie Laborde, fille de lingère sans le sou, échappe à une vie misérable en devenant infirmière auxiliaire, à l’aube de la grande guerre de 14. Un jour, elle prend l’identité d’une femme qu’elle a vu mourir sous ses yeux, touchée par un obus. Ainsi, elle pense trouver une vie meilleure en se présentant à sa place chez une riche veuve, Eleonore, dont elle devient la lectrice. Le mensonge fonctionne au delà de ses espérances…
Ce drame romanesque, situé dans les heures sombres du premier conflit mondial, démarre assez mollement avec une installation maladroite et quelques séquences un peu « rapides » dans leur élaboration. Puis, au bout de vingt minutes, les enjeux mis en place, l’histoire de cette usurpation d’identité commence à nous saisir pour ne plus nous lâcher. La réalisatrice Aurélia Georges, diplômée de la FEMIS, signe là son troisième long métrage et s’attache à décrire avec minutie les habitudes d’une maison bourgeoise, avec à sa tête une veuve dirigeant son personnel avec fermeté, mais justesse. Sa mise en scène, un peu trop figée, assume un classicisme que l’on peut trouver « daté », mais elle parvient tout de même à instaurer un vrai lien entre ses personnages, à dresser un joli portrait de femme perfide, mais dans le seul but de se trouver un destin plus reluisant. Le film tient sa ligne sans faillir et distille un suspense prenant quant à l’issue à venir. L’autre qualité à souligner réside dans la faculté de la cinéaste à traiter subtilement de la lutte des classes à une époque troublée, dans laquelle il fallait survivre coûte que coûte.
Certes, la narration se déroule de façon linéaire et sans « prise de risques » majeures, pour autant elle accroche notre intérêt jusqu’au bout. Les deux comédiennes sont également pour beaucoup responsables de cette réussite: la jeune Lyna Khoudri, décidément prometteuse, se glisse admirablement dans la peau de cette héroïne secrète et menteuse, tout en lui donnant une vraie humanité, et Sabine Azéma, que l’on ne présente plus, est impeccable en riche veuve rigide mais plus sensible que les apparences ne le laissent paraitre. Bien souvent, l’académisme étouffe certains films, Aurélia Georges a su s’en servir d’une manière séduisante.
ANNEE DE PRODUCTION 2022.
