Vicky, petite fille solitaire, a un don: elle peut sentir et reproduire toutes les odeurs de son choix qu’elle collectionne dans des bocaux étiquetés avec soin. Elle a extrait en secret l’odeur de sa maman, Joanne, à qui elle voue un amour fou et exclusif. Un jour, Julia, la soeur de son père, fait irruption dans leur vie. Vicky se lance dans l’élaboration de son odeur et se voit transportée dans des souvenirs obscurs, mettant à jour des secrets concernant sa famille et sa mère en particulier.
En 2017, la jeune réalisatrice Léa Mysius s’était distingué avec un premier long métrage accrocheur intitulé Ava. Cette fois, elle se lance avec ambition dans son second opus et propose un récit situé entre deux genres: le drame familial et le conte fantastique. La petite héroïne, Vicky, possède un don lui permettant de sentir les odeurs et d’en comprendre les « fondements », d’où un aspect assez bizarre du scénario orchestré autour d’elle et de ses parents, un couple en apparence heureux. Jouant à tordre son scénario pour le complexifier, Léa Mysius fait preuve d’originalité et au menu, on trouve aussi bien des distorsions temporelles déroutantes que des constructions de séquences volontairement ambigus. Il faut garder son attention en éveil permanent pour recoller les morceaux de ce puzzle quelquefois alambiqué, mais qui gagne en puissance au fur et à mesure que l’on se laisse glisser dans cette histoire d’amour lesbien, traitée avec sensibilité. Dans les décors naturels des Alpes, aussi inquiétants qu’apaisants, le film ne veut jamais faire dans la facilité, d’où le mélange de drame et de fantastique, pour mieux entrainer l’action vers des contrées inexplorées.
Cette fable sur la véritable nature que l’on enfouit en soi trop souvent pour rentrer dans un moule bénéficie d’un très bon casting, composé de nouveaux talents (Sally Dramé et Swala Emati devraient refaire parler d’elles), et porté en tête d’affiche par la décidément douée Adèle Exarchopoulos. La multiplication des thèmes évoqués (l’homosexualité, l’enfance tourmentée, le racisme pour ne citer qu’eux) déplaira à un public habitué à suivre une voie et une seule, mais les routes tracées par Léa Misyus sont en tout cas bien prometteuses.
ANNEE DE PRODUCTION 2022.