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BETTE DAVIS

1908/1989

Bette Davis est née en 1908 à Lowell, une bourgade de la banlieue de Boston. Sa famille très puritaine fut vite divisée avec le départ de son père, qui n’apporta que peu d’amour dans son foyer. Sa mère abandonnée par ce mari fuyant reporte son attention sur sa fille et tente de l’élever au mieux, malgré les difficultés quotidiennes. Lorsqu’elle eut 16 ans, elle assista à une représentation de la pièce Le canard sauvage d’Ibsen et trouva la voie toute tracée de son avenir. Etre actrice sera son destin et sa façon d’affirmer sa personnalité. Sa vocation va s’exprimer sur les planches de New York jusqu’à la fin des années 20, et le théatre lui met donc le pied à l’étrier. Un agent de la Universal Studio, en repérages de nouveaux talents la remarque et lui organise un bout d’essai à Hollywood. Elle débarque à 21 ans dans la Cité des Anges, telle quelle, c’est à dire un peu mal fagotée, peu maquillée, sans la moindre sophistication , avec pour seul bagage sérieux son appétit de jouer. Et c’est vrai qu’elle n’est pas aussi jolie ni aussi éclatante que les jeunes femmes qui inondent les écrans, dès l’arrivée du parlant. A tel point qu’on va la surnommer « le petit cygne noir », autrement dit le vilain petit canard. Ses yeux globuleux et son curieux visage quasi ingrat ne lui donnent pas d’emblée des emplois de jeune première séductrice.

Son premier rôle sera celui de la soeur introvertie de l’héroine dans The bad sister en 1931, produit donc par la Universal qui lui signe un contrat et lui donne ensuite d’autres emplois, dans des films peu mémorables comme La maison de l’enfer, Le Pont de Waterloo, ou La menace. A chaque fois, elle se démarque par une présence réelle et sauve presque les scripts du désastre. Mais son tempérament va surtout exploser aux yeux de tous quand elle joue Mildred dans Of human bondage (L’emprise en français), une jeune serveuse manipulatrice et perverse, abusant d’un homme adorable très amoureux d’elle et à qui elle va faire les pires choses. Ce film produit par la Warner (qui va devenir son studio de référence) va connaitre un grand succès, malgré la noirceur de ce personnage féminin qu’elle défend avec force et pugnacité. Dés lors, Bette Davis a compris que, pour être aimée et respectée dans ce milieu régi par des hommes, elle doit se battre sans cesse, la volonté chevillée au corps, et prête à en découdre pour obtenir les meilleurs rôles, usant d’un caractère très affirmé. Elle n’était pas « méchante » à proprement parler, mais avait son franc parler et les conflits avec ses metteurs en scène ou partenaires firent parfois bien du bruit! Sa dureté lui a permis de creuser son sillon et de devenir une Star. C’était une nouvelle corde à son arc, mais elle avait déja l’essentiel: elle était la plus grande actrice de sa génération et même Greta Garbo ou Katharine Hepburn (pourtant des pointures à l’époque) ne lui arrivaient pas à la cheville, niveau jeu. Fini donc le temps des personnages indigents ou falots, elle se démene pour interprêter des femmes fortes, pleines de courage et de résolution. Entre 1935 et 1939, son statut lui rapporte un premier Oscar pour L’intruse, le public l’adore en femme battue et défigurée mais qui va se venger dans Femmes marquées , les audiences l’applaudissent aussi en Jezebel de William Wyler, où son insoumission de jeune Sudiste lui colle à la peau. Après ça, sa popularité ne fera que grandir encore et encore.

Sa carrière sera placée sous le signe du combat. Elle s’acharne à jouer avec une parfaite jouissance les femmes dominatrices, souvent excécrables, des garces à la moralité douteuse (La Lettre, La vieille fille, La vipére), tout en cultivant une ambition claire: demeurer la meilleure et pour longtemps. Son physique est un atout finalement, elle a bien sûr fait des efforts pour devenir plus jolie en soignant son maquillage, ses tenues et sa photogénie ont fait le reste. Son charisme surtout fut sa plus belle arme: son regard impitoyable faisait frémir les producteurs les plus durs disait on. Quand elle attaqua le studio Warner, en l’accusant de ne lui donner que des personnages similaires, de film en film, elle n’aura pas peur de les assigner en justice. Chose impensable et inédite à l’époque, où les stars prenaient soin d’empocher leurs cachets faramineux, sans rechigner sur la qualité des produits finis. Elle perdit son procès, mais gagna la sympathie immédiate de tout un pan du public, qui l’encouragea à incarner des femmes un peu plus douces. Ce fut le cas avec le très beau Victoire sur la nuit, sorti en 1939, elle y est une demi mondaine frappée d’une cécité progressive et qui endure sa maladie jusqu’au bout. Ce grand mélo a marqué les esprits et lui ont apporté une image moins revêche.

Durant les années 40, sa concécration est totale et elle tourne dans une trentaine de films au cours de cette décennie fabuleuse, toujours en tête d’affiche, le box office et les critiques lui étant acquises, elle peut se permettre de tout jouer, même dans des productions moins réussies comme La voleuse. Son jeu net et vibrant allié à un impressionnant abattage sonne tel un coup de cravache, et des oeuvres comme Une femme cherche son destin ou Femme aimée est toujours jolie, deviennent des classiques du cinéma américain, uniquement grâce à elle. En effet, elle a presque toujours été plus forte que les cinéastes qui l’ont fait travailler (hormis Wyler peut être), comme si elle se devait de tout maitriser, afin d’être la patronne en tout. Elle se montre encore plus talentueuse et superbe dans Eve de Mankiewicz en 1950, où en actrice de théatre arrivée à la quarantaine et minée par l’arrivisme d’une rivale, elle trouve son plus beau personnage. Dans la vie, elle a aussi des maris, dont celui qu’elle gardera le plus longtemps Gary Merill, un acteur plutôt médiocre qui saura la rendre heureuse, lorsque l’age venant, le téléphone sonne moins et que les propositions de films se raréfient. D’ailleurs, dans les années 50, Bette ne sera à l’affiche que de huit films, la concurrence étant rude avec les nouvelles actrices comme Liz Taylor, Marilyn Monroe et l’arrivée de la télévision.

Faisant preuve d’un admirable orgueil, la Dame n’hésite pas, après quelques années de chômage forcé, à publier une petite annonce dans un quotidien corporatif, disant qu’elle est une actrice expérimentée depuis plus de 30 ans et qu’elle cherche un emploi « quelconque » à tenir! Cet humour ravageur qui la caractérise sera payant, puisque elle est engagée dans Qu’est il arrivé à Baby Jane?, un jeu de massacre entre deux anciennes gloires d’Hollywood, deux soeurs qui se détestent et se déchirent dans un huis clos terrifiant. En face d’elle, Joan Crawford, sa rivale de toujours, contre qui elle peut lâcher son mépris et sa hargne, en ne faisant pas toujours semblant. Ce tournage infernal est devenu aussi mythique que le film et lui redonne une seconde jeunesse. Grimée, outrancière, et odieuse comme jamais, on salue sa performance dans le monde entier. Par la suite, elle sera surtout utilisée dans des rôles de marâtres, de harpies laides et antipathiques (Chut Chut Chère Charlotte, The anniversary ou un film italien étonnant L’argent de la vieille de Comencini), sa classe restant intacte et l’acuité de son flair sans égal.

Revenue de tout et de tous, elle traverse la décennie 70 telle une vaillante guerrière, cherchant sans cesse à jouer, même dans de mauvais téléfilms. Pour exercer son métier qui était toute sa vie, rendre le public fier d’elle. Les interviews, qu’elle donne à foison à des journalistes impressionnés par son parcours exemplaire, sont toutes des moments d’anthologie, entre drôlerie, lucidité, et fausse modestie. Elle avait adopté une fille qui s’empresse de publier un livre scandale, racontant l’éducation rigide et difficile qu’elle a reçu, la décrivant comme une actrice « dure, violente » et pas toujours très humaine dans l’intimité. Son ultime coup d’éclat est donné en 1986, dans Les baleines du mois d ‘Août, un film délicat sur la vieillesse, elle y est sublime de dignité, face à un autre monstre sacré, Lillian Gish. Malgré de multiples opérations et un cancer persistant depuis plus de dix ans, l’octogénaire continue d’apparaître, aux yeux du monde, certes très amaigrie et affaiblie, mais elle assume tout comme d’habitude. Quand la mort vient la faucher en Octobre 1989, nul doute qu’elle est encore debout, les poings serrés, le regard défiant, et comme d’habitude, Bette Davis n’a pas peur.

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