Dans une villa bretonne en bord de mer, vivent Louise et Gilles, un frère et une soeur. Lui est infirme, suite à une paralysie des jambes et elle a préféré rester vieille fille, afin de s’occuper de lui au quotidien. Leur seule amie, Yvette, la boulangère du coin, est une femme entre deux âges, un peu tarte mais attachante. Un jour, Louise pense à passer une petite annonce dans un journal local pour trouver l’amour. C’est son propre frère qui va lui répondre, sans se douter une seconde que c’est elle qui est à l’origine de l’annonce…
Moshe Mizrahi fut le réalisateur de La Vie devant soi en 1977 et obtint un conséquent succès avec cette adaptation du roman d’Emile Ajar. Il y dirigeait la grande Simone Signoret, idéale Madame Rosa, et il la retrouve pour la seconde fois pour cette comédie dramatique, située en Bretagne et racontant les rapports au quotidien d’une soeur et de son frère handicapé, de leur solitude commune, mais aussi de leur immense attachement. Le scénario serait assez plat si Mizrahi n’avait imaginé cette histoire de quiproquo naissant de leur correspondance amoureuse et qui, bien entendu, fait tout le sel de cette intrigue tendre et charmante. Avec une bonne dose de sensibilité, il dépeint un amour fraternel qui ne dit pas son nom, par pudeur, par délicatesse: Gilles est dépendant de Louise, qui a sacrifié sa vie affective pour lui et qui voudrait pouvoir plaire encore, séduire à nouveau, ressentir les vertiges d’une passion. Alors, elle accepte le subterfuge juste pour se donner du rêve, quitte à en oublier la réalité. Le personnage de Louise est beau, simple, humain et profondément altruiste. Certes, la réalisation ne brille pas d’inventivité ou de tonus, et n’évite pas une certaine platitude, mais l’intérêt est ailleurs: chez les comédiens!
Simone Signoret, donc, habite la peau et le coeur de cette soeur Courage, aimante et elle y met toute la tendresse dont elle est capable, en actrice admirable qu’elle était. Pour lui faire face et faire un tandem inédit et convaincant, Mizrahi a choisi Jean Rochefort, espiègle, piquant, ne s’apitoyant jamais sur sa condition d’infirme et encore capable de pulsions sexuelles dévorantes. Entre eux, la trop rare et lumineuse Delphine Seyrig joue leur amie fantaisiste et un peu coincée avec beaucoup d’aisance. Cette Chère Inconnue n’est certainement pas un grand film, mais un joli drame gai (ou une comédie triste?), dans lequel un humour subtil empêche le mélo de se répandre.
ANNEE DE PRODUCTION 1980.
