Un banal accident de voiture. Pierre, la quarantaine, en est la victime. Tandis qu’il gît quasiment inconscient au sol, des bribes de sa vie lui reviennent en tête. Séparé de sa femme Catherine, il vivait avec Hélène, sa maitresse dont il était très épris, et qu’il envisageait de quitter. Il repense aux jours heureux, avant cet accident aussi inattendu que stupide…
A la fin des années 60, Claude Sautet sort de ses deux premiers longs métrages, plutôt amer et déçu par leur accueil tiède (Classe tous risques et L’arme à gauche). Il a l’ingénieuse idée de collaborer avec le jeune scénariste Jean Loup Dabadie pour adapter un très court roman de Paul Guimard. En résulte ce film charnière de sa carrière de cinéaste. Charnière, car il y trouve enfin son style, c’est à dire parler comme personne des émotions humaines, des déchirements intérieurs des hommes (et des femmes), du temps qui passe, de la vie qui coule. Avec ce sujet, il élabore un récit construit en flash backs, où son héros Pierre, victime d’un terrible accident automobile, voit défiler les grandes lignes de son existence, les tourments, les chagrins mais aussi les bonheurs qu’il a connu. Le film dit de manière aussi simple que somptueuse l’absurdité de l’existence, ces petits riens du quotidien qui en font le sel, et puis d’un coup la mort. Cette mort qui rôde sans cesse, à l’affût pour venir stopper net le déroulement des choses. On a rarement aussi bien capté au cinéma l’imprévisibilité des événements, l’inexorable couperet de la fatalité. Mais Sautet ne se contente pas de faire une oeuvre sombre, il filme avec soin et sensibilité les êtres aussi bien que cet accident de voiture brutal et spectaculaire. Même ses ralentis ont de la gueule (contrairement à certains réalisateurs qui en abusent sans justification).
Le film est également solaire, paradoxalement plein de vie, de sentiments et d’amour, puisque le personnage, déchiré par un dilemme amoureux, prend la route un peu comme une fuite en avant vers son destin. Sur une musique anthologique de Philippe Sarde (qui restera le complice de Sautet jusqu’au bout), de beaux dialogues bien écrits et un couple inoubliable: Michel Piccoli, formidable en homme amoureux et à mille lieux d’imaginer ce qui l’attend, et bien entendu Romy Schneider, lumineuse pour sa première collaboration avec celui qui allait devenir son cinéaste mentor incontournable. Tous les astres sont harmonieusement alignés pour faire de ce film un classique indispensable. Le succès en salles fut énorme et l’obtention du Prix Louis Delluc un couronnement mérité.
ANNEE DE PRODUCTION 1970.
