PARADIS POUR TOUS

Cloué à un fauteuil roulant, Alain Durieux est pourtant enfin heureux. Lui qui avait une vie monotone de démarcheur en assurances, coincé entre sa femme (charmante au demeurant) et sa belle mère insupportable, dans un petit pavillon de banlieue… Tout a commencé après son suicide manqué, lorsque le psychiatre Pierre Valois, venant de mettre au point une thérapeutique révolutionnaire, appelée le « Flashage », trouve son cas très intéressant. Grâce à ce miraculeux traitement, la décevante existence d’Alain devient d’un coup un rêve éveillé et souriant…

On a déjà plusieurs fois évoqué au fil de certaines critiques de films toute la singularité du cinéma d’Alain Jessua, son style à nul autre pareil, et mis en lumière ses grands opus que sont Traitement de Choc, Armaguedon ou Les Chiens. Des intrigues souvent situées dans des futurs incertains, des histoires d’anticipation comme c’est encore le cas avec ce Paradis Pour Tous. Une apparente comédie sur un homme vivant dans un fauteuil roulant mais clamant son bonheur et sa joie de vivre grâce à un médecin, lui ayant octroyé un traitement de choc (encore un!) à base d’antidépresseurs surpuissants, et l’ayant ainsi transformé en un être constamment satisfait de tout (même du pire!), dénué d’affect, sur qui tout semble couler. Jessua tire à boulets rouges sur cette psychiatrie en vogue promettant à des hommes et des femmes au bord du désespoir des palliatifs médicamenteux mensongers. Sa satire, d’un cynisme affolant tout du long, pointe du doigt l’injonction au bonheur absolu et à n’importe quel prix dans une société qui, en réalité, fait plus peur que nous rassurer! Son héros semble anesthésié par ce qui l’entoure, comme si ses sentiments étaient téléguidés et qu’il se comportait tel un robot programmé à « sourire » béatement, imperméable à tout type de conflit. Le propos occasionne bien des séquences amusantes, mais le rire y est toujours malaisant et cache bien des angoisses.

Dans son ultime rôle, Patrick Dewaere est éblouissant en cadre dépressif soudainement planant comme sur un nuage et son jeu s’est sûrement nourri de ses propres névroses, lui qui hélas allait réellement se suicider, quelques mois après la fin du tournage. Une mise en abyme terrifiante à laquelle on ne peut s’empêcher de penser et qui fait froid dans le dos. A ses côtés, un casting sans fausses notes constitué de Philippe Léotard, de Jacques Dutronc parfait en médecin nonchalant, de Fanny Cottençon semblant être la seule à réaliser l’aspect profondément factice de ce « bien être » préfabriqué. Paradis pour tous est bien trop « déplaisant » et dérangeant pour plaire à un large public, mais une fois de plus, Alain Jessua a su capter les maux d’une société et le ton y est plus que jamais d’une belle modernité.

ANNEE DE PRODUCTION 1982.

 

REVIEW OVERVIEW

réalisation
scenario
interprétation

CONCLUSION

Malaisante, dérangeante, comique et pourtant profondément dramatique, cette satire grinçante est une des plus belles réussites d'Alain Jessua. Dernière bouleversante composition de Patrick Dewaere.

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