Joe Horton fut un dramaturge au succès éclair au mi temps des années 60 en Angleterre. Il vivait librement son homosexualité dans une époque encore répressive et une société conservatrice. Il rencontre, assez jeune, Kenneth, dont il tombe amoureux. Les deux hommes forment un couple heureux pendant dix ans, puis leur relation s’envenime… jusqu’au drame!
En s’inspirant de la vie (brève mais intense) du dramaturge anglais Joe Horton, le cinéaste Stephen Frears nous invite à découvrir les événements qui amenèrent l’auteur, alors en pleine ascension professionnelle (une de ses pièces faisait un carton), à être tragiquement assassiné par son amant et amour de toujours, Kenneth Halliwell, devenu avec le temps son assistant et nourrissant à son égard une jalousie maladive et un sentiment d’infériorité psychotique. Le film, construit en flash backs, aurait pu facilement être une évocation dramatique et glauque de cette relation toxique terminant mal, mais Frears va à contre courant et se dirige davantage vers un traitement plus léger, ironique et même iconoclaste de cette figure de la littérature britannique. Surtout connu pour son homosexualité affichée et décomplexée, Joe Orton ne faisait pas mystère de ses amours et de ses relations sexuelles, affichant une attirance pour les « rencontres de pissotières », largement réprouvées au Royaume Uni dans ses sixties très « coincées ». Le futur auteur de The Queen s’amuse à épingler l’hypocrisie de cette société, ses idées reçues et fait de son héros un personnage haut en couleurs haïssant bien sûr le conformisme ambiant. Audacieux et percutant dans son humour vachard, le film n’en demeure pas moins une histoire d’amour avec ses hauts et ses bas, et bien sûr son issue fatale.
Frears est épaulé dans son entreprise par ses deux acteurs remarquables et constituant un duo mémorable: Gary Oldman trouve là un de ses rôles les plus risqués et s’en sort avec les honneurs, Alfred Molina convaincant en amoureux de plus en plus aigri et dépité par le succès et les infidélités de son amant. Dans un rôle secondaire plus court mais non moins important, Vanessa Redgrave incarne le témoin de leur relation avec la grandeur qui lui est propre. Prick Up your Ears concourait pour la Palme d’Or à Cannes, qu’il n’obtint pas, mais ses multiples qualités en font à ce jour un des meilleurs opus du cinéaste anglais.
ANNEE DE PRODUCTION 1987.
