La très belle chanteuse de cabaret Amy Jolly tombe un soir amoureuse de Tom Brown, un soldat français de la Légion Etrangère. Malgré l’opposition de ses autres prétendants, dont Kennington, Amy arrange un rendez vous avec Brown et leur attirance mutuelle se mue en amour immédiat. Pourtant, Brown, convaincu que Kennington pourra rendre Amy heureuse en l’épousant, accepte de prendre ses distances…
Après avoir sublimement révélé Marlène Dietrich avec L’Ange Bleu, Josef Von Sternberg, persuadé qu’elle aura toute sa place à Hollywood, l’embarque dans la Cité des Anges et lui fait donc tourner ce Morocco, qui achève d’assoir l’actrice allemande dans son statut de star absolue. Sternberg se sert d’un petit roman de gare sans envergure pour tisser ce drame amoureux quasi racinien, dans lequel les personnages sacrifient la raison pour leur désir, aussi insaisissable soit il! Dans un Maroc exotique recrée en studio, la passion brûle l’entraineuse Amy et son beau légionnaire Tom, avare d’effusions amoureuses, conservant son trouble, droit dans ses bottes. La séquence la plus célèbre qui fit scandale à cette époque chaste montre Marlène habillée en smoking d’homme et haut de forme, fendre la foule en chantant de sa voix grave et finir par embrasser une femme sur la bouche devant les yeux subjugués d’un Gary Cooper filmé comme un véritable objet de désir. Sternberg introduit la notion d’érotisme « silencieux » dans un Hollywood encore à peine remis de l’avènement du parlant. La rareté des dialogues permet des échanges de regards brûlants, accentue une atmosphère bouillonnante jusqu’au final ouvert sur un désert immense dans lequel l’héroïne jette littéralement son destin d’amoureuse totale.
Morocco semble à première vue doté d’un script bien mince, c’est surtout ce qu’en fait Sternberg qui force l’admiration: une romance pleine de fureur (sans cris ni larmes), un audacieux procédé « échangeant » les sexes et leur rôles habituellement assignés, et surtout il reste la preuve irréfutable que la caméra capte tout chez une actrice de la trempe de Marlène: pas seulement sa beauté, mais sa classe, sa photogénie évidente, son aptitude à donner chair à n’importe quel type d’héroïne, la plus mauvaise comme la plus fascinante. Par la magie de ses atouts de metteur en scène, Sternberg ouvre la voie à leur collaboration exceptionnelle qui fera naitre pas moins de six films.
ANNEE DE PRODUCTION 1930.



