Dans une ville portuaire du Nord de la France, où domine la grisaille, des êtres isolés, malfrats habitués à la violence, vont soudain voir leurs vies bouleversées par le théâtre, la poésie, et l’art en général. Et leurs quotidiens transformés par l’amour…
Ecrivain et cinéaste reconnu depuis près de vingt ans, Samuel Benchetrit a imposé un style bien à lui dans des films comme Janis et John, Asphalte ou plus récemment le déstabilisant Chien. Son univers, décalé, et ses personnages, déclassés ou originaux, trouvent avec ce nouvel opus leur point culminant. Il met en scène des truands à l’approche de la cinquantaine, vivant de petites combines et de grandes bagarres, et va les ouvrir au monde par le biais de la culture et du miracle des sentiments. Benchetrit veut montrer qu’il existe de la beauté en toute chose et de l’espoir dans l’existence la plus sombre. Sa comédie originale et déjantée se pare d’un trait d’absurde qui ne fonctionne que par intermittences, un coup il offre une séquence miraculeuse de poésie, un autre coup l’humour passe plus mal ou ne touche pas sa cible. Les dialogues ne sont pas en cause, car l’écriture du réalisateur navigue avec talent et fluidité entre le comique, le mélancolique et témoignent d’une belle sensibilité d’auteur. C’est plutôt les portraits sociaux dépeints qui ne sont pas tous aussi réussis entre eux, d’où une sensation de résultat un peu inégal.
Mais le film possède une fantaisie et une verve indéniables que l’on prend plaisir à suivre. D’autant que la troupe de comédiens réunis forment un joyeux groupe choral au tempo séduisant et drolatique. Les brutes passent à la tendresse (JoeyStarr, Bouli Lanners, Gustave Kervern et Ramzi Bedia s’y collent avec brio), le toujours impressionnant François Damiens tente de séduire une jeune caissière avec des poèmes de son cru, et les deux femmes du film ont la grâce et la lumière de celles qui veulent encore vibrer. Valéria Bruni Tedeschi imposante dans un petit rôle, et surtout Vanessa Paradis (deuxième collaboration avec son mari et auteur) compose un contre emploi étonnant de femme bègue se rêvant en Simone de Beauvoir! Les petites notes de musique découlant du film imprègnent nos oreilles et nous rappellent combien l’amour ouvre la voie de tous les possibles. On pardonne alors les quelques faiblesses de l’ensemble.
ANNEE DE PRODUCTION 2021.
