CC Baxter est employé à la Sauvegarde, grande compagnie d’assurances. Dans l’espoir d’un avancement, il prête très souvent son appartement à ses supérieurs qui y emmènent leurs petites amies. Un beau jour, le chef du personnel le convoque et lui apprend qu’il sait tout… et lui demande aussi la clef pour s’y rendre avec sa maitresse, la jolie Fran, liftière d’ascenseur que Baxter trouve aussi très à son goût…
On pensait que tout le génie de Billy Wilder, certainement le réalisateur le plus doué d’Hollywood, avait dit ses derniers mots après les chefs d’oeuvre que furent Assurance sur la mort, Sunset Boulevard et Certains l’aiment chaud. Il n’en était rien puisque La Garçonnière clôture en beauté cette série, dans le genre satire acerbe. A la fois comédie drôlissime, critique du milieu bureaucratique et de son arrivisme, peinture amère de la solitude des grandes villes, ce nouveau coup de maitre jongle avec tous ces sujets de manière virtuose et se paye le luxe de faire rire (beaucoup) avec des choses pas forcément gaies (le désespoir amoureux, le suicide, l’infidélité conjugale). Wilder ne se pose pas en moraliste devant les écarts sexuels de ces types qui empruntent l’appartement du héros pour leur « cinq à sept », mais montre jusqu’où peut aller un homme désireux de gravir les échelons de la réussite sociale. Sur un script brillant et millimétré, La Garçonnière est un festival de bons mots, de répliques cultes, il faut dire que dans ce domaine Wilder n’a pratiquement pas d’équivalent. Le film dit donc beaucoup de choses sur les relations hommes/femmes, la manière dont la société américaine broie l’individu, le pousse à toujours viser plus haut, au risque d’oublier qui il est vraiment et comment regarder son prochain avec compassion et amour! L’amour, justement, occupe aussi une place de choix bien évidemment dans ce récit: un amour platonique plus qu’un coup de foudre, mais ce qu’il a de plus beau, c’est que l’on assiste surtout à la rencontre de deux âmes soeurs blessées.
Toute cette partie sentimentale est soutenue par un couple ravissant (et pourtant pas acquis dès le départ): Jack Lemmon, acteur fétiche de Wilder, toujours caustique et précis dans son jeu, et Shirley Mac Laine, charmante, loin des canons de beauté de l’époque (cheveux courts, sans artifices lourds et au naturel désarmant). A leurs côtés, Fred Mac Murray, inoubliable dans un autre opus de Wilder Assurance sur la mort et que l’on retrouve ici en patron insensible et goujat. Même si le cinéaste signa encore quelques très bons opus après celui ci, La Garçonnière reste sûrement son dernier grand film: profond, divertissant, intelligent, romantique. Cinq Oscars sont venus le récompenser et depuis, on aurait presque toujours envie d’égoutter les spaguettis avec une raquette de tennis.
ANNEE DE PRODUCTION 1960.