Pendant l’Occupation Allemande à Paris, Claude, le fils d’un pelletier juif, est reconduit chez lui, après avoir volé un tank dans un magasin de jouets. Craignant que son geste n’attire l’attention de la Gestapo, son père le confie à une voisine qui conduit l’enfant chez ses vieux parents, dans une campagne près de Grenoble. Là vit le « pépé », un vieil homme bougon et passablement raciste…
Après une petite expérience en tant qu’acteur et la réalisation de quelques courts métrages, Claude Berri se lança dans l’aventure de son premier long métrage. Il en résulta ce joli film, tourné avec un budget modeste, racontant l’histoire toute simple de ce vieil antisémite pétainiste recueillant un jeune garçon juif (sans savoir qu’il est juif justement!) et entretient avec lui une belle relation pleine de tendresse. Le futur cinéaste de Tchao Pantin n’est pas allé chercher bien loin la matière narrative de son film, il la puise dans sa vie propre et relate en grande partie son enfance tourmentée, vécue au cours des années de guerre et d’Occupation. Un sujet très cinématographique que Berri restitue dans un noir et blanc remarquable, avec une mise en scène sans fioritures, rappelant par moments le cinéma de Jean Renoir. Cette chronique tendre et nostalgique fait la part belle à ce duo inattendu, ce choc des générations: un enfant d’à peine dix ans et un papy râleur et raciste tissent un lien à coups de réparties savoureuses. Le gamin laisse le vieux débiter ces pensées moisies sur les juifs et le presse de questions incessantes pour le déstabiliser dans ses certitudes.
Berri évite les pièges misérabilistes trop vus dans tant de films évoquant cette époque noire, il se concentre sur ces deux êtres et sur leur amitié fort touchante. Si l’entreprise atteint largement son but, il faut admettre que la présence au générique du grand Michel Simon n’y est pas étrangère. L’acteur y tient son dernier très beau rôle, plus vrai que nature en pépé champêtre bourré de préjugés, mais s’ouvrant au monde grâce au petit Alain Cohen, interprétant le jeune Claude avec beaucoup d’émotion. En y mettant tout son coeur et sa sincérité, Berri s’est ouvert une voie royale dans le cinéma, même si l’on peut déplorer qu’il fut par la suite plus porté vers des oeuvres très commerciales. Celle ci en tout cas n’a pas pris une ride et défie le temps sans se démoder.
ANNEE DE PRODUCTION 1966.
