Mary Jane, presque 40 ans, deux filles, fait la connaissance de Julien, un adolescent de 15 ans, ami de sa fille Lucy et fan de jeux vidéos. Elle tombe amoureuse du jeune garçon, qui se laisse troubler également. Ils se voient en secret, flirtent ensemble. Lors d’un voyage en Angleterre dans la famille de Mary Jane, Lucy et Julien sont venus et la « passion » entre l’adulte et l’ado se précise. Le temps des vacances se passe, la rentrée sera le retour aux « réalités »…
En plein tournage de son portrait sur Jane Birkin, Jane B par Agnès V, la cinéaste Agnès Varda et son actrice s’accordèrent une pause estivale durant laquelle elles mirent au point ce petit film élaboré à la va vite, avec des bouts de ficelle et dans un esprit de famille. Kung Fu Master raconte le trouble naissant entre une maman quarantenaire et un lycéen de 15 ans, une errance de coeur plus qu’une véritable histoire d’amour, vécue par les deux protagonistes comme une parenthèse enchantée (ou désenchantée). Le sujet pourrait au premier abord paraitre scabreux sans la fantaisie de Varda, son aptitude à rendre cette relation pudique, sensible plus que charnelle. Mary Jane est une femme mélancolique de sa jeunesse passée et voit en Julien une manière de ressentir de nouveau des sensations d’antan, et Julien, flatté par cet intérêt qu’elle lui porte, s’attache aussi à elle avec l’inconséquence de son jeune âge. Plus comédie que drame, Kung Fu Master saisit très bien l’air du temps, s’inscrit dans son époque et évoque à plusieurs reprises le SIDA, à ce moment là fléau mondial et inquiétant toutes les générations, mais aussi plus légèrement les jeux vidéos que l’on trouvait dans les cafés au côté des flippers. Le jeune héros est fan d’un jeu lui permettant d’oublier un peu l’ingratitude et le mal être de ces années lycée.
Si la connivence entre les acteurs parait si évidente, c’est justement parce que Varda a tourné dans sa maison de la Rue Daguerre et dirige son propre fils Mathieu Demy, face à Jane Birkin, émouvante dans ce rôle touchant, ainsi que Charlotte Gainsbourg et la toute petite Lou Doillon incarnant ses filles… comme dans la vraie vie! Du cinéma artisanal en somme, ne cherchant pas l’épate, ni même à construire un scénario très structuré, on est à la limite de l’improvisation dans certaines séquences. Prétendre que Kung Fu Master est un grand film serait beaucoup dire évidemment, mais il respire la simplicité tout en questionnant la notion de désir féminin.
ANNEE DE PRODUCTION 1988.
