De retour de l’internat, Pierre, 17 ans, adolescent maussade, apprend la mort de son père, annoncée par sa mère, insensible à l’événement. Elle lui avoue même qu’elle n’a jamais été une sainte. Il rentre alors dans son univers autodestructeur et aux moeurs dissolues, cherchant constamment son amour et son approbation…
Après un court métrage et un long salué par la critique intello, 17 fois Cécile Cassard, le réalisateur français Christophe Honoré ne choisit pas la facilité du tout en s’emparant du roman posthume de l’écrivain Georges Bataille, intitulé Ma Mère. Voulant atteindre l’amour absolu dans sa relation avec sa mère, un jeune homme la suit dans ses penchants sadomasochistes, totalement débridés sexuellement et sans aucune limite morale. Avec un sujet pareil, Honoré s’attend bien sûr à des réactions plutôt vives, d’autant que le traitement de son récit verse dans une provocation frontale assumée: il décrit en images les mots de Bataille, laissant libre cours à la perversion, à la crudité des situations, et de ce point de vue, Ma Mère est un film courageux. Courageux et même réellement dérangeant, en tout cas tant qu’il reste dans une insidieuse frontière entre le suggéré et le « montré », Honoré s’attachant à suivre à l’aveugle les dérives de ce fils envouté par cette maman ô combien toxique, consciente de sa mauvaise influence et en prime qui ne cherche pas à changer d’attitude. Par moments, la mise en scène se fourvoie dans des procédés maladroits de ralentis ou de flous « artistiques » qui desservent l’ensemble, un peu comme si Honoré se regardait filmer avec supériorité, satisfait de lui même. De plus, si toute la première heure parvient à mettre mal à l’aise avec un poison dilué avec parcimonie, la suite s’égare dans une démonstration de séquences répétitives censées « émoustiller » (triolisme, SM, exhibition, inceste), finissant par lasser.
Dans le rôle sulfureux au possible de la mère, je demande évidemment la spécialiste du genre: Isabelle Huppert se régale dans cette partition trouble, antipathique, sombre. Face à elle, Louis Garrel, 20 ans à peine et acteur depuis peu et qui doit assurer cette « confrontation » en jouant à la fois le côté candide et influençable et une attirance pour l’interdit. Si le film ne manque pas d’audace et connait quelques fulgurances, il se dirige hélas vers une radicalité trop poussive et « contre productive » qui empêche de se sentir véritablement choqué. Peut être parce que tenter de traduire la pensée si forte de Bataille conduit inévitablement à « exagérer »!? A ce titre, la scène finale provoque plus de perplexité que de malaise.
ANNEE DE PRODUCTION 2004.